2025, première quinzaine

1 mars 2025. Rwanda. Mise en examen d’un ancien doyen d’une faculté de médecine du Rwanda pour génocide, crimes contre l’humanité et « entente en vue de la commission de ces crimes ». Cet homme est soupçonné d’avoir participé au génocide des Tutsis en 1994 dans la préfecture de Butare (sud du Rwanda). Il aurait « facilité » le génocide ou, du moins, ne s’y serait pas opposé.

(https://www.lemonde.fr/afrique/article/2025/03/01/genocide-des-tutsi-au-rwanda-un-ex-doyen-d-une-faculte-de-medecine-mis-en-examen-a-paris_6572211_3212.html)

 

4 mars 2025. Soudan. L’Unicef dénonce un potentiel crime de guerre. L’Unicef rapporte que depuis le début de l’année 2024, 221 enfants ont été violés, pour deux tiers des filles, par des hommes armés au cours de la guerre civile qui oppose depuis avril 2023 l’armée soudanaise aux Forces de soutien rapide (FSR). Seize enfants avaient moins de cinq ans et, parmi eux, quatre avaient à peine un an. Par ailleurs, 77 cas supplémentaires d’agression sexuelle contre des enfants, principalement des tentatives de viol, ont été recensés. L’agence des Nations unies précise que ces chiffres sont inférieurs à la réalité. Elle juge que ces actes sont « susceptibles d’être considérés comme des crimes de guerre ».

(https://news.un.org/fr/story/2025/03/1153616)

 

4 mars 2025. France. Séminaire : « Le recours à la justice transitionnelle dans les démocraties consolidées : vers de nouvelles perspectives ? ». Sont intervenus au cours de ce séminaire : Tine Destrooper, Professeure à l’Université de Gand (Belgique), en résidence auprès de l’Institut d’Etudes Avancées de Paris ; Elke Evrard, Chercheure post-doctorante à l’Université de Gand ; et Xavier Philippe, Professeur à l’Université Paris Panthéon-Sorbonne, Directeur de l’ISJPS.

(https://univ-droit.fr/recherche/actualites-de-la-recherche/manifestations/57614-le-recours-a-la-justice-transitionnelle-dans-les-democraties-consolidees-vers-de-nouvelles-perspectives)

 

5 mars 2025. La Haye. Dépôt par le Soudan d’une requête introductive d’instance devant la Cour internationale de justice contre les Emirats arabes unis. Le Soudan estime que les Emirats arabes unis ont manqué aux obligations qui leur incombent au regard de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide. Ils auraient apporté un « soutien direct », « financier, politique et militaire massif » aux Forces de soutien rapide (FSR) et aux milices associées qui auraient commis des actes de génocide, des meurtres, des expropriations, des viols, des déplacements forcés, des violations de propriété privée, des dégradations de biens publics et des violations de droits de l’Homme à l’égard du groupe des Massalits. Le Soudan demande à la Cour de prendre des mesures conservatoires, notamment : la prévention par les Emirats arabes unis de la commission d’actes de génocide ; et la surveillance qu’aucune unité armée irrégulière qui pourrait relever de leur autorité ou bénéficier de leur appui ne commette de tels actes, n’en soit complice ou n’incite directement et publiquement à leur commission.

(https://www.icj-cij.org/sites/default/files/case-related/197/197-20250306-pre-01-00-fr.pdf)

 

5 mars 2025. Rwanda. Arrestation de l’un des meurtriers de Rosalie Gicanda, la dernière reine du Rwanda. Capturé en République démocratique du Congo par les membres du M23 et ceux de l’Alliance fleuve Congo (AFC – coalition de groupes rebelles et de partis politiques), Ezechiel Gakwarere, un des principaux officiers rwandais accusés du meurtre de la reine tutsie Rosalie Gicanda le 20 avril 1994, a été remis au Rwanda le 1er mars 2025. La porte-parole du gouvernement rwandais a assuré qu’il serait jugé. Il était l’un des leaders des Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR – groupe formé en 2000 par les forces armées en exil qui ont commis le génocide au Rwanda).

(https://www.liberation.fr/international/afrique/trente-ans-apres-le-genocide-des-tutsis-lun-des-meurtriers-de-la-derniere-reine-du-rwanda-capture-en-rdc-20250305_XPSX6CKG2NHU5O2ZOW32CM3EYI/)

 

6 mars 2025. La Haye. Dépôt par le Guyana d’une demande en indication de mesures conservatoires dans l’affaire de la Sentence arbitrale du 3 octobre 1899 (Guyana c/ Venezuela) devant la Cour internationale de justice. Le 29 mars 2018, le Guyana a déposé une requête introductive d’instance contre le Venezuela s’agissant de « la validité juridique et l’effet contraignant de la sentence arbitrale du 3 octobre 1899 relative à la frontière entre la colonie de la Guyane britannique et les Etats-Unis du Venezuela ». Le 30 octobre 2023, le Guyana a déposé une demande en indication de mesures conservatoires en raison de l’intention du Venezuela de tenir, le 3 décembre 2023, un « référendum consultatif » relatif à « la création annoncée, au sein du Venezuela, de l’Etat de la « Guayana Esequiba » », comprenant le territoire en litige. Dans son ordonnance du 1er décembre 2023, la Cour a enjoint au Venezuela de « s’abstenir d’entreprendre toute action qui modifierait la situation prévalant dans le territoire en litige ». Ce jour, le Guyana a déposé une nouvelle demande en indication de mesures conservatoires en raison de l’intention du Venezuela de tenir, le 25 mai 2025, des élections dans la région guyanienne de l’Essequibo.

(https://www.icj-cij.org/sites/default/files/case-related/171/171-20250307-pre-01-00-fr.pdf)

 

6 mars 2025. Soudan. L’ONU met en évidence un « système généralisé » de détentions arbitraires, de tortures et de mauvais traitements des détenus. Dans le cadre de la guerre civile qui oppose depuis avril 2023 les Forces armées soudanaises (FAS) aux Forces de soutien rapide (FSR), des dizaines de milliers de personnes, dont des femmes et des enfants, ont été détenues arbitrairement. Ceux qui ont pu en sortir rapportent que de nombreux détenus sont décédés faute de soins médicaux, tant dans les centres de détention des FSR que dans ceux des FAS. Le rapport de l’ONU fait état de l’utilisation d’enfants de 14 ans comme gardiens, ainsi que de la détention d’enfants âgés de 13 ans aux côtés d’adultes. En outre, les anciens détenus affirment avoir subi des traitements discriminatoires fondés sur leur appartenance ethnique et leur affiliation supposée à la partie adverse.

(https://news.un.org/fr/story/2025/03/1153711)

 

10 mars 2025. République démocratique du Congo. Procès en appel pour le meurtre du chef traditionnel Mbangu, qualifié de crime de guerre. Lors du procès en première instance, Marcel Tshilumba et Emmanuel Mukini ont été condamnés à la peine de mort pour avoir décapité et mutilé le chef traditionnel Mbangu en 2017 à Masuika (Kasaï Central). Ce crime a été commis dans le cadre du conflit dit de Kamuina Nsapu (2016-2019) lors duquel la milice du même nom (à laquelle les accusés ont adhéré) a mené une rébellion contre les forces de sécurité du pays. Au terme du procès en appel, qui s’est tenu du 3 au 7 mars 2025, le procureur militaire a requis la peine de mort pour les deux hommes. Le 10 mars, la cour a rendu son verdict en réduisant la peine des accusés à 20 ans d’emprisonnement chacun. Les juges ont notamment tenu compte de leur jeune âge au moment de faits et de l’influence du milieu dans lequel ils vivaient.

(https://www.justiceinfo.net/fr/142517-reglement-de-comptes-au-kasai.html)

(https://www.justiceinfo.net/fr/142568-double-verdict-devant-population-masuika.html)

 

11 mars 2025. Philippines. Arrestation de l’ancien président, Rodrigo Duterte, en application d’un mandat de la Cour pénale internationale. La Cour estime que Rodrigo Duterte, en tant que fondateur et chef de l’escadron de la mort de Davao, puis en tant que maire de la ville de Davao, et ensuite en tant que Président des Philippines, est pénalement responsable de « crimes contre l’humanité de meurtre » commis aux Philippines entre le 1er novembre 2011 et le 16 mars 2019. Il est soupçonné d’avoir commis ces crimes « dans le cadre d’une attaque généralisée et systématique dirigée contre la population civile ». Les procureurs de la Cour estiment le nombre de morts entre 12 000 et 30 000. Se définissant lui-même comme un tueur, Rodrigo Duterte a estimé que cette répression, consistant pour les agents de police à « tirer mortellement sur les personnes soupçonnées de trafic de stupéfiants si leur vie était en danger », avait permis de sauver des familles et d’éviter au pays de sombrer dans le trafic de drogue. L’ancien président reste extrêmement populaire aux Philippines ; il est en lice pour retrouver son ancien poste de maire aux élections de mi-mandat, en mai 2025.

(https://www.lemonde.fr/international/article/2025/03/11/aux-philippines-l-ancien-president-rodrigo-duterte-arrete-en-application-d-un-mandat-de-la-cpi_6578386_3210.html)

(https://www.icc-cpi.int/fr/news/situation-aux-philippines-rodrigo-roa-duterte-detenu-par-la-cpi)

 

12 mars 2025. Syrie. Attaque de civils alaouites dans le sillage d’une opération militaire dans l’ouest de la Syrie. Après plusieurs attaques contre les forces de sécurité du nouveau régime dans les provinces de Lattaquié et Tartous, une patrouille est tombée le 6 mars 2025 dans une embuscade tendue par des hommes armés dans le village de Beit Ana (Lattaquié), faisant treize morts et plusieurs blessés. Le lendemain, les nouvelles autorités ont envoyé des milliers de soldats dans ces provinces, berceaux de la minorité alaouite, branche de l’islam chiite dont est issu l’ancien chef d’Etat Bachar Al-Assad. Les rebelles armés sont des partisans de l’ancien régime. D’après l’Observatoire syrien des droits de l’Homme (OSDH), le 7 mars, on comptait 136 civils décédés au cours de l’opération militaire, dont au moins treize femmes et cinq enfants. Des vidéos publiées sur les réseaux sociaux montrent des hommes armés, certains en uniformes, humilier des civils, « les faisant ramper ou aboyer comme des chiens », et les exécuter de manière sommaire. Ce ne serait pas la première fois que les forces du nouveau régime commettent des exactions dans la province de Lattaquié. Ahmed Al-Charaa, président par intérim depuis le 29 janvier 2025, à la suite de la chute de Bachar Al-Assad le 8 décembre 2024, a rapidement promis de présenter devant la justice « tous ceux qui ont versé le sang » et « menacé le peuple ». Il a également exhorté ses troupes à « éviter toute exaction ou débordement ». Toutefois, le 12 mars, l’OSDH comptait 1 383 civils tués, dans leur écrasante majorité des membres de la minorité alaouite.

(https://www.lemonde.fr/international/article/2025/03/06/en-syrie-une-dizaine-de-morts-des-forces-de-securite-dans-les-plus-violents-affrontements-depuis-la-chute-du-regime-al-assad_6576845_3210.html)

(https://www.lemonde.fr/international/article/2025/03/08/syrie-apres-des-affrontements-sanglants-dans-le-bastion-des-alaouites-les-nouvelles-autorites-de-damas-face-a-une-situation-explosive_6577114_3210.html)

(https://www.rfi.fr/fr/en-bref/20250312-violences-en-syrie-au-moins-1-383-civils-tu%C3%A9s-depuis-le-6-mars)

 

13 mars 2025. Gaza. L’ONU dénonce des « actes génocidaires » commis par Israël à l’encontre de la population gazaouie. Une Commission d’enquête mandatée par le Conseil des droits de l’Homme de l’ONU a relevé que « les autorités israéliennes ont en partie détruit la capacité des Palestiniens à Gaza – en tant que groupe – à faire des enfants, à travers la destruction systématique des soins de santé sexuelle et reproductive ». Cela correspond à deux catégories d’actes génocidaires dans le Statut de Rome et la Convention sur la prévention et la répression du crime de génocide : les « mesures visant à entraver les naissances au sein du groupe » et la « soumission intentionnelle du groupe à des conditions d’existence devant entraîner sa destruction physique totale ou partielle ». La Commission vise notamment la destruction, en décembre 2023, par les forces de sécurité israéliennes de la plus grande clinique de fécondation in vitro, al Basma, qui conservait des milliers d’embryons. Par ailleurs, le rapport constate plus largement une augmentation de la fréquence et de la gravité des violences sexuelles et sexistes dans l’ensemble du territoire palestinien occupé, constituant « une stratégie de guerre visant à dominer et à détruire le peuple palestinien ».

(https://news.un.org/fr/story/2025/03/1153911)

 

14 mars 2025. France. Conférence : « Mandats d’arrêts de la CPI : quelle effectivité du droit pénal international ? ». Cette conférence était animée par Farah Safi, Professeur de droit privé à l’Université Clermont Auvergne et Vice-Présidente de JURDI et par Johann Soufi, Chef du UN Accountability Project pour le Sri Lanka au sein du Haut-Commissariat aux droits de l’Homme à Genève. Ont été abordés : le rôle de la Cour pénale internationale, ainsi que l’obligation de faire respecter le droit international via la présentation des moyens dont disposent les Etats, comme la France, pour parvenir au respect de cette obligation.

(https://univ-droit.fr/recherche/actualites-de-la-recherche/manifestations/57747-mandats-darrets-de-la-cpi-quelle-effectivite-du-droit-penal-international)

 

14 mars 2025. Finlande. Première condamnation d’un Russe hors d’Ukraine pour des crimes de guerre commis dans ce pays. Voislav Torden, dirigeant du groupe paramilitaire affilié à la Russie, Rusich group, a été condamné ce jour en Finlande, en vertu de la compétence universelle, à la réclusion à perpétuité pour quatre crimes de guerre. S’agissant du meurtre de 22 soldats ukrainiens en 2014, le tribunal a estimé que « les preuves ne permettaient pas d’établir avec certitude que le groupe Rusich était seul responsable ». Les autres chefs d’accusation, pour lesquels l’accusé a été condamné, concernent les « méthodes barbares » employées lors de cette attaque.

(https://www.justiceinfo.net/fr/142770-crimes-de-guerre-en-ukraine-un-russe-condamne-a-la-perpetuite-en-finlande.html


OpenEdition vous propose de citer ce billet de la manière suivante :
Pascal Plas (28 mars 2025). 2025, première quinzaine. JUPIT-er # JUstice Patrimoine Institutions Territoire - études et recherches. Consulté le 16 novembre 2025 à l’adresse https://doi.org/10.58079/13lc6